Du 7 au 11 mai 2025, Santa Fe s’est transformée en capitale de la mode autochtone lors de la Native Fashion Week. Des créateurs venus de tout le continent nord-américain ont présenté des collections inspirées de leurs racines culturelles, mêlant traditions ancestrales et expressions contemporaines. Cet événement, organisé par la Southwestern Association for Indian Arts (SWAIA), a offert une plateforme unique pour célébrer l’identité et la créativité autochtones.
◆ Raconter l’identité
Les matériaux utilisés : soie, peaux d’animaux, perles, rubans, bijoux, racontent des histoires. Les créateurs allient techniques ancestrales et innovations modernes, comme les textiles numériques ou le streetwear autochtone. Pour Patricia Michaels, créatrice de Taos Pueblo révélée dans l’émission Project Runway, « la mode autochtone raconte une histoire sur notre compréhension de ce que nous sommes, individuellement et au sein de nos communautés ».
Randi Nelson, artiste Secwépemc venue du Yukon, illustre cette transmission. Ses créations en cuir d’élan et de caribou, tannées sans produits chimiques selon des méthodes traditionnelles, témoignent de l’ingéniosité culturelle. « Il n’y a pas un style autochtone universel, mais autant de styles que de nations », souligne-t-elle.
@Gary Bremner/GBP Creative
◆ Une vision commune
Sage Mountainflower, originaire de Taos Pueblo et de la nation Navajo, présente sa collection Taandi : “printemps” en Tewa – inspirée de son héritage familial. Ayant grandi dans les allées du marché de Santa Fe où ses parents vendaient leurs œuvres, elle incarne la continuité vivante de cette tradition artistique. Sa collection, haute en couleur, fait dialoguer mémoire et renouveau.
Jeremy Donavan Arviso, créateur de Phoenix issu de plusieurs nations (Diné, Hopi, Akimel O’odham, Tohono O’odham), défend quant à lui une esthétique résolument urbaine. Son approche, inspirée du sampling musical du hip-hop, croise grandes marques, motifs de rue et références tribales. Il a présenté Vision Quest, une collection percutante accompagnée d’une performance de la danseuse torontoise Madison Noon.
◆ La mode, vecteur politique et économique
Au-delà de l’esthétique, des questions cruciales émergent. Une table ronde a abordé les défis économiques liés aux matériaux et aux tarifs douaniers, tout comme la tension entre la mode jetable et les principes autochtones de durabilité. Ce dialogue souligne l’ambition de faire de Santa Fe non seulement une scène artistique, mais aussi un forum de réflexion et de résilience.
Le clou de l’événement ? La présence remarquée de Deb Haaland, ancienne secrétaire à l’Intérieur des États-Unis, qui a défilé vêtue de créations de Patricia Michaels et de bijoux de Veronica Poblano, orfèvre de Zuni Pueblo. Une manière puissante de souligner l’importance politique et symbolique de cette mode qui puise ses racines dans la dignité.
@Veronica Poblano
La Native Fashion Week de Santa Fe 2025 a été bien plus qu’un simple défilé de mode mais plutôt une célébration vibrante de l’identité, de la mémoire et de la créativité autochtone. Entre héritage culturel et innovations stylistiques, les créateurs ont affirmé la richesse et la pluralité de leurs visions. Cette semaine a démontré que la mode autochtone est une force en pleine expansion qui crée un dialogue avec le monde tout en restant fidèle à ses racines. Un mouvement artistique, politique et profondément humain, qui continue de redéfinir les codes du vêtement comme ceux de la représentation.
« La mode est notre langue visuelle. Elle raconte qui nous sommes, d’où nous venons, et comment nous imaginons l’avenir », Patricia Michaels, créatrice de Taos Pueblo
Jessica Baucher
+ Crédit photo en-tête d’article : ©Pixabay
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