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Raoni, la voix de l’Amazonie face aux menaces du progrès



À 93 ans, le chef kayapo tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme : alors que la COP30 se tient à Belém, il dénonce les projets du Brésil qui menacent la forêt amazonienne et les peuples qui la protègent.


Alors que la COP30 se déroule actuellement à Belém, au cœur même de l’Amazonie, la voix du chef Raoni Metuktire résonne comme un écho venu du plus profond de la forêt. À 93 ans, ce leader kayapo, mondialement connu pour son combat en faveur des peuples autochtones et de la nature, alerte une nouvelle fois sur les dangers qui menacent le “poumon vert” de la planète. Dans une interview accordée à Reuters, le chef Raoni s’est insurgé contre les projets d’infrastructures que le gouvernement brésilien entend développer dans la région : autoroutes, voies ferrées et explorations pétrolières. Selon lui, ces chantiers compromettent directement la survie de la forêt et de ceux qui y vivent. « Ces projets détruisent les rivières et les terres, et ils continuent de le faire… Ce sera très mauvais pour nous. Et pour vous aussi. Vous en êtes vous-mêmes responsables », a-t-il déclaré dans sa langue maternelle, le kayapo.


Une COP30 décisive pour l’Amazonie

Cette conférence des Nations unies sur le climat marque un tournant historique : pour la première fois, la plus grande rencontre mondiale sur l’environnement se tient au cœur d’une forêt tropicale, à Belém, capitale de l’État du Pará. Un symbole fort voulu par le président Lula, qui entend faire de l’Amazonie la vitrine de la diplomatie climatique brésilienne. Il a placé les peuples autochtones au centre de son discours écologique, affirmant que leur savoir et leur mode de vie sont essentiels à la lutte contre le changement climatique. Cependant, sur le terrain, la réalité est plus nuancée. Raoni et d’autres leaders dénoncent des décisions contradictoires : si le gouvernement a relancé la délimitation de plusieurs territoires autochtones protégés, il continue à soutenir des projets d’exploitation pétrolière et minière. L’autorisation récente accordée à Petrobras d’explorer des gisements offshore à 500 kilomètres de l’embouchure du fleuve Amazone a provoqué l’indignation des communautés locales et des ONG. Pour Raoni, aucun de ces projets ne profite aux populations concernées : « J’avais parlé à Lula avant sa prise de fonctions et je lui avais dit qu’il fallait agir pour que mon peuple obtienne enfin ses terres de droit », rappelle-t-il.



@association Jiboiana



Folie moderne ?

Le chef Raoni n’est pas un inconnu des grandes tribunes internationales. Déjà présent lors du Sommet de la Terre de Rio en 1992, il y plaidait pour la préservation des forêts et la reconnaissance des peuples autochtones. Trente ans plus tard, il constate avec amertume que le message n’a pas été entendu. « Quand les forêts étaient partout, je suis allé à cette réunion pour parler de la forêt. J’ai dit qu’elle devait être préservée. Et malgré cela, ils ont continué à tout détruire ». Pour lui, la COP30 ne doit pas être un énième rassemblement de promesses non tenues, mais une occasion d’agir concrètement. À ses yeux, les peuples autochtones – gardiens des forêts depuis des millénaires – doivent être acteurs à part entière des décisions environnementales mondiales. Cette revendication, partagée par des dizaines de délégations autochtones venues de toute l’Amazonie, fait partie des grands débats de la COP30 : comment intégrer le savoir traditionnel dans les politiques climatiques, et comment garantir la protection juridique des territoires indigènes face aux appétits économiques ?



@association Jiboiana



Raoni incarne la mémoire vivante d’une Amazonie en péril, mais aussi l’espoir d’une humanité capable de renouer avec la Terre. Sa parole, empreinte de sagesse, dépasse les frontières du Brésil. Elle nous rappelle que la lutte pour la forêt est aussi une lutte pour notre avenir commun


Jessica Baucher


+ Crédit photo en-tête d’article : ©Pixabay



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