Interdits d’entrer sur le site historique de Pétra, sauf avec autorisation du gouvernement jordanien, les bédouins de la tribu des Bdoul sont en colère. Leur survie économique est menacée par cette décision car beaucoup d’entre eux vivent du tourisme.

Après que Pétra est devenue un site du Patrimoine mondial en 1985, l’UNESCO et l’État Jordanien ont commencé à relocaliser les bédouins de la tribu des Bdoul vivant jusqu’alors dans des grottes, sur et autour du site. L’État leur avait offert en dédommagement des maisons en béton dans un village nouvellement créé appelé Oum Sayhoun. Beaucoup de familles ont accepté pour des raisons de commodité et de proximité des écoles, mais certains n’ont pas renoncé à leur mode de vie traditionnel. Une quarantaine de familles vivent toujours dans des grottes. Elles n’ont pas encore été expropriées, mais déplacées dans des excavations plus excentrées du Trésor et du monastère, points principaux visités par les touristes. Mais il n’y a ni eau potable, ni électricité, et il est impossible de tenir debout à l’intérieur des cavités. Pour obliger les bédouins à partir de leurs grottes d’origine, les autorités leur avaient coupé l’eau courante. Mais beaucoup de ces bédouins, bergers à l’origine, ont continué à occuper certaines grottes et à venir sur le site pour travailler avec les touristes, proposant des plats locaux, du thé, des balades à chameaux ou à dos d’âne ou des objets artisanaux car il n’y a pas de travail dans cette région désertique.

◆ Un avenir incertain
Cette situation est depuis longtemps une source de tensions entre les tribus Bdoul, qui assurent une grande partie du petit commerce, et l’État qui considère leurs activités comme illégales et dérangeantes pour le tourisme. Déjà en août 2022, la Direction générale de la gendarmerie jordanienne avait envoyé des véhicules blindés équipés de canons à gaz lacrymogène dans le parc archéologique de Pétra afin de « supprimer toute installation non autorisée dans la région ». Les autorités jordaniennes justifient leurs actions en expliquant craindre que Pétra soit inscrite sur la liste des sites menacés du patrimoine mondial de l’Unesco. « La présence de ces familles dans les grottes est contraire aux idées de l’Unesco et aux lois jordaniennes. L’agence onusienne demande en effet que les Bédouins soient réinstallés dans des vrais logements et qu’on leur offre des opportunités de travail. Il y a actuellement environ quarante familles dans les grottes et nous travaillons à leur trouver un logement alternatif avant de les expulser de Pétra », a expliqué Ismail Abu Amud, chef adjoint de la Commission des réserves et du tourisme. Capitale de l’empire nabatéen de 400 avant J.-C. à 106 après J.-C., Petra attire chaque année de plus en plus de touristes. On ignore quand la tribu des Bdoul a commencé à habiter ce site mais l’on sait que des tribus nomades vivaient dans la région dès 1 500. Les Bdoul vivant autour de Pétra sont originaires de la tribu des Howeitat, et affirment descendre directement des Nabatéens – peuple arabe de l’Antiquité qui vivait au sud de la Jordanie et de Canaan ainsi que dans le nord de l’Arabie – et avoir ainsi hérité de droit de la cité ancienne de leurs ancêtres. La population des Bdouls de Pétra est estimée à 3000 personnes.

Brigitte Postel

À voir : Préserver le mode de vie de la tribu des Bdoul – Slice Peuples

+ Crédit photo en-tête d’article : ©Brigitte Postel

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