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Dreamtime… la quête des nouveaux shifteurs sans boussole


Cela fait bientôt deux ans que le shifting a vu le jour aux États-Unis et ce phénomène ne cesse d’augmenter principalement chez les adolescents, y compris en France, via les réseaux sociaux. Le shifting s’inspire de la pratique chamanique du « rêve lucide » afin de permettre à des jeunes de s’évader de la réalité de ce monde qu’ils ne comprennent pas et dans lequel ils n’arrivent plus à se projeter. Le sujet est préoccupant puisqu’ils s’y plongent via des tutoriels vidéos et n’ont aucun accompagnement durant leurs voyages.

Dreamtime
La psychologie moderne et TikTok n’ont rien inventé ! Le rêve lucide est pratiqué depuis la nuit des temps par différentes ethnies dont la plus célèbre est celle des Sénoï mais également par les Shipibo-conibo d’Amérique du sud et bien d’autres peuples autochtones que les anthropologues appellent les dream-cultures. « Toutes les cultures chamaniques de la planète sont, peu ou prou, des dream-cultures : les Amérindiens des trois Amériques, les Sibériens, les Australiens, les Polynésiens ; certaines populations en Corée, en Chine et au Japon, en Inde ; en Hongrie même, encore au début de ce siècle, officiaient les taltos, les derniers chamans magyars. Les cultures africaines et leurs extensions dans le vaudou haïtien, la macumba et le candomblé brésiliens ou la santéria cubaine, elles aussi, attachent énormément d’importance au rêve — à ce domaine de l’ « autre côté » du jour, quand un des aspects du Moi s’en va voyager dans cet ailleurs du rêve pour y faire des expériences, ou pour en ramener quelque chose, ou pour y rencontrer des aspects du Sacré. », nous indique Michel NACHEZ, docteur en anthropologie et chargé d’enseignement à l’université de Strasbourg, dans sa thèse Les états non ordinaires de conscience. Pour les Aborigènes, le rêve est même le véhicule parfait qui permet de rentrer en communication avec l’invisible mais aussi les êtres créateurs, le dreaming, afin de recevoir des enseignements et des informations pour évoluer. « Le rêve est ainsi le moyen de voyager dans cet espace-temps à la fois immobile, éternel, permanent, du Temps du Rêve d’où tout est issu — et de recevoir un peu de son potentiel créateur au service de l’être humain, de la communauté humaine et de l’ensemble du créé. Pour les Aborigènes donc, le rêve de l’homme est une des « portes » d’accès vers cette dimension atemporelle, en perpétuelle transformation, et, paradoxalement, en constant re-souvenir de ce qu’elle est — a été — sera, de tous temps, en toute fidélité à elle-même (…) », poursuit M. Nachez, spécialisé depuis 1999 en cyber-anthropologie.




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Champignons cognitifs

Quelques mois après le confinement mondial lié à la pandémie de 2020, un mouvement appelé Shifting – un nouveau type de méditation guidée qui permet de quitter sa CR (current reality : réalité quotidienne) pour se projeter dans sa DR (desired reality : vie rêvée) – a émergé sur les réseaux sociaux. Afin d’échapper à la difficulté du quotidien, la jeune génération s’est mise vouloir changer littéralement de réalité… Inspirée par la méthode RAVEN, influencée par les travaux du psychologue américain John Carlyle Raven et par les explorations du docteur américain Robert Monroe, le shifting est une technique utilisée par des adolescents, essentiellement sur l’application TikTok (le hastag #ShiftingRealities compte aujourd’hui plus de 10,7 milliards de vue). Cette méthode propose « un voyage mental dans l’invisible, une dérive vers une réalité fantasmée, que l’on atteint, sans drogues, mais grâce à la méditation, la répétition d’affirmations pour guider son esprit, l’écoute de « subliminaux« , des sons d’une certaine fréquence. Une sorte de relaxation dirigée qui tient de l’auto-hypnose », précise la journaliste Julia Vergely dans un article pour Télérama. De nombreuses vidéos indiquent comment s’entrainer et appliquer la méthode pour réussir à « sortir de son corps » et partir voyager dans d’autres réalités. Il ne s’agit pas pour autant d’exercices de visualisation d’une vie rêvée ou rarement, mais plutôt d’expériences dans des univers familiers de fiction tels que les mangas, Harry Potter … Un article du média L’ADN nous relate les propos d’une jeune américaine « qui souffre de dépression et explique avoir commencé à changer régulièrement de réalité il y a un an. Son univers de prédilection ? Poudlard, où elle affirme entretenir une véritable idylle avec Drago Malefoy, l’ennemi juré du célèbre sorcier Harry Potter : « Généralement, je “shifte” toutes les semaines, mais cela dépend vraiment de mon emploi du temps. Si j’ai cours le lendemain ou que j’ai beaucoup de travail, je change de réalité, mais seulement pendant un jour ou deux, pour faire ce que j’ai à faire. Ça m’apporte beaucoup de bonheur. »



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Un besoin de rituels
Cette pratique semble nous montrer à quel point notre société moderne est en quête d’un autre monde. Si ces jeunes pouvaient être accompagnés de guides spirituels dans leur pratique, tels que ceux qui naissent dans une tribu en pleine forêt, ils n’essayeraient pas de fuir seuls dans des mondes préfabriqués par des héros fictifs ayant soif de pouvoirs, d’absolu, et ne prendraient pas le risque de s’y perdre. « La transe hypnotique peut engendrer un état de dissociation, qui « peut être perturbant, dérangeant. On peut avoir des difficultés à se réassocier ». (…) Le rêve éveillé a toujours été l’apanage de la grande adolescence. Mais là, comment garder un pied dans la réalité ? Comment continuer de se sentir heureux dans le monde réel, aussi imparfait soit-il ? » , souligne Julie Mayon, psychologue et directrice pédagogique de l’Institut français d’hypnose, dans l’article de Télérama.



« La raison d’exister de tous les êtres sensibles est de mettre en valeur la conscience » Carlos Castaneda


Jessica Baucher


Image en tête de l’article : @Pixabay





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